Les Torses

Se situant dans la frontière entre abstraction et figuration, Benoît Luyckx n’a représenté le corps humain que de manière fragmentaire et peu figurative. Il a focalisé ses recherches sur le mouvement et l’équilibre uniquement dans la zone du torse, lieu de la respiration, donc de toute vie, et qui suffit au sculpteur pour transcender la représentation intérieure et existentielle de l’être.

Dans la série des « Torses », initiée en 1989, la sculpture se libère du corps pour tendre vers « une interprétation moderne de la forme artistique en trois dimensions (…) La représentation devient une présentation, voire une présence » (Margitt Rowell).

face

dos

Torse Musical, 2009
marbre blanc grec
52 x 36 x 15 cm

Ses torses noirs, bleus ou blancs qui ont pris la forme synthétique du trapèze, sont aussi le support d’écritures, celles des différentes textures qui révèlent les aspects multiples de l’être humain. Striée, lissée ou gravée, la surface de la pierre, à la vue comme au toucher, procure la sensation d’un pelage, qui tend à rapprocher l’humain de son origine animale, conférant aux œuvres de Benoît Luyckx leur intemporalité et leur sensualité manifeste.

« Torse Martial II », 2005

pierre bleue belge

62 x 59 x 23 cm

Torse 144 Infini Bleu, 1993

marbre noir de Belgique et pigment bleu, composition de 144 éléments mesurant 16,5 x 15 x 4,5 cm, fixés sur panneau de bois

A propos du « Torse 144 Infini Bleu »
 

Construction éphémère, ce torse est composé de cent quarante quatre petites surfaces rectangulaires sculptées en ondulations.

Cette idée de sculpture a été longue à réaliser mais pleine d’enseignements. Méthodique, j’ai été confronté à penser la mécanisation de mon geste avec l’outil électrique, et à aller au-delà de l’automatisation en me libérant dans une improvisation répétée.

J’obtins ainsi un ensemble homogène composé d’éléments variés. Je pris également conscience, par cette expérience, du danger de l’automatisation comme le dénonçait déjà Charlie Chaplin dans « Les Temps Modernes ». Mais heureusement, dans le cas de ma création, chaque empreinte de disque usant la matière est dirigée dans le plaisir d’une spontanéité renouvelée. Au fur et à mesure, cette réalisation m’a également intéressé par la numérologique des 144 éléments composant le torse sur une trame de douze par douze. L’analyse numérologique de ces chiffres m’intrigue et notamment par des approches d’application de la preuve par neuf, et aussi par d’autres jeux d’additions et de soustractions. Je me sens encore bien novice dans ce domaine, mais j’y perçois des secrets magiques !

Pour conclure, j’ai imaginé en réponse à ce monde des chiffres, l’univers des mots. Chacun de ces éléments devient alors le messager d’une pensée, d’une image poétique. J’aime penser que chacun d’entre eux sera dispersé mais fera toujours partie de l’ensemble initial ; la photo restera le souvenir.

Benoît Luyckx